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Pourquoi ce blog

L'objet de ce site est de baliser par quelques souvenirs éloquents l'histoire récente et de faire contribuer ces expériences, par des commentaires d'actualité, à éclairer et choisir les changements, en s'interrogeant sur les propositions des politiques et les analyses des essaiystes. Donc, à l'origine, deux versants : l'un rétrospectif, l'autre prospectif.

A côté des problèmes de société (parfois traités de manière si impertinente que la rubrique "hors des clous"a été conçue pour les accueillir), place a été faite à "l'évasion" avec des incursions dans la peinture, le tourisme, des poèmes,  des chansons, ce qui constitue aussi des aperçus sur l'histoire vécue.

 

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L'auteur

 

DSCF0656-copie-1.JPGNé en 1933, appartenant à la génération dont l'enfance a été marquée par la deuxième guerre mondiale, l'occupation et la Résistance, l'adolescence par la Libération, la guerre froide, puis par de clairvoyants engagements pour les décolonisations, l'auteur a ensuite partagé sa vie professionnelle entre le service public (il a notamment été préfet, délégué à l’emploi, directeur des affaires économiques de l’outre-mer, président de sa chaîne de radio-télévision, RFO), l'enseignement et la publication d’ouvrages de sciences politiques (il est aujourd’hui membre du comité de rédaction et collaborateur régulier de la Revue Politique et Parlementaire). Il a également assumé des missions dans de grandes entreprises en restructuration (Boussac, Usinor/Sacilor), puis a été conseil d’organismes professionnels.

 

Alors que ses condisciples ont été en particulier Michel Rocard et Jacques Chirac (il a partagé la jeunesse militante du premier dans les années cinquante et fait entrer le second à Matignon dans les années 60, avant d'être son premier collaborateur à l’Emploi et pour la négociation de Grenelle et au secrétariat d’Etat aux Finances, il n'a suivi ni l'un, ni l'autre dans leurs itinéraires. En effet, dans le domaine politique, comme il ressort de ses publications (cf. infra), Gérard Bélorgey n’a rallié ni la vulgate de la Veme république sur les bienfaits de l’alternance entre partis dominants, ni les tenants du catéchisme du libre-échange mondial. Il ne se résigne donc pas à TINA ("there is no alternative" au libéralisme). Tout en reconnaissant les apports autant que les limites de ceux qui ont été aux affaires et avec lesquels il a travaillé, il ne se résigne pas non plus à trouver satisfaction dans tel ou tel programme de camp. Mesurant combien notre société multiculturelle, injuste et caricaturalement mondialisée, souffre aussi bien des impasses de l’angélisme que des progrès de l’inégalité et des dangers de l’autoritarisme, il voudrait contribuer à un réalisme sans démagogie.

 

Partie de ses archives est déposée dans les Fonds d'Histoire contemporaine de la Fondation des Sciences Poltiques (cf. liens).

 

Il a publié sous d'autres noms que celui sous lequel il a signé des ouvrages fondamentaux que furent "le gouvernement et l'administration de la France" (1967), "la France décentralisée" ( 1984), "Les Dom-Tom" (1994)  : le pseudo de Serge Adour correspond à l'époque de la guerre d'Algérie et à une grande série de papiers dans Le Monde en  1957 , celui d'Olivier Memling au recueil de poèmes et chansons "Sablier " (couronné en 1980 par l'Académie Française et référé, dans l'histoire littéraire du XXeme Siècle de Hachette) celui de  Gérard Olivier à son analyse dans de  grands quotidiens de la décentralisation en 1981/82; celui de Solon  (malheureusement partagée par erreur avec d'autres auteurs) à la publication en 1988 de "la démocratie absolue" . Cessant de vivre un peu masqué, il retrouve son nom en 1998 pour "Trois Illusions qui nous gouvernent", puis en 2000 pour "Bulles d'Histoire et autres contes vrais " (série de coups de projecteurs sur quelques apects du dernier demi siècle qui seront souvent repris ci-dessous), ainsi que pour de  nombreux articles dans  diverses revues. EN 2009, il est revenu sur la guerre d'Algérie avec le roman ( Ed. Baurepaire) "La course de printemps". Il prépare "L'évolution des rapports Gouvernés /Gouvernants sous la Veme République :entre absolutismes et renouvellements?"

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14 octobre 2012 7 14 /10 /octobre /2012 17:54

L'évocation que je viens de faire de Lascaux me conduit à revenir sur mes "mémoires de Dordogne" que je tire de l'ouvrage précité sur ce blog " Bulles d'Histoire et autres contes vrais" ( Phenix Editions 2000) 

 

 - "ENTREZ TOUS - 1977" 

 

Des vies intenses  mêlaient sur ce vieux terroir les faisceaux de leurs diversités. Les repas de chasse, de comices agricoles, de célébrations historiques ou de "félibrées" occitanes n'étaient pas seulement, dans telle halle ou telle bastide, telle grange ou tel château, telle ferme ou tel restaurant, telle grotte ou telle salle des fêtes, de redoutables chemins gastronomiques reproduisant les menus pouvant compter, arrosés de blancs moelleux et de rouges puissants,  les douzaines de plats d'antan. C'étaient aussi des circonstances où se révélaient les uns et les autres : l'érudition de beaucoup, l'enracinement de tous, l'attachement passionné des petits exploitants à leur complexe de tabac, vaches laitières et maïs et des grandes familles à leurs ruines en restauration accrochées aux escarpements dominants les abris sous rochers des temps préhistoriques. Philippe Rossillon vint y promener, les dernières années de sa vie, son profil d'aigle hanté par la francophonie et les nostalgies de "Patrie et Progrès". La créativité culturelle - dans l'édition qu'illustra le talent de Pierre Fanlac,  les arts plastiques, la restauration architecturale - se nourrissait de terreaux immémoriaux.

 

Mettre le passé au présent était l'active volonté d'un milieu régional qui aimait, pour certains jusqu'à s'en ruiner, tous ses patrimoines. Le conseil général, déjà propriétaire de bien des demeures, adhéra à l'idée d'acheter le château en perdition d'une vieille noble famille parce que "des manants pourrait ainsi coucher un jour dans le lit de leurs maîtres". Les héritiers de "Jacquou le croquant" assuraient ainsi bien des actions salutaires. C'est ce Département de la Dordogne  qui devint, sur ma proposition et après que le bénéficiaire de la concession, Emmanuel de la Rochefoucauld, n'ait pu faire face aux trop importantes dépenses qu'il fallait consentir, le maître d'ouvrage de la réalisation d'un fac similé  de la Grotte de Lascaux . Calcification et champignons avaient conduit Malraux à la fermer au public. On ne croyait guère en ce temps au succès d'une copie. Il fallut unir la foi en leur pays de conseillers généraux de gauche et la perspicacité d'un ancien membre du cabinet de G. Pompidou, le très fin Philippe Lecat.

 

Il était devenu ministre de la Culture, après avoir été élu, en Côte d'Or, dans une circonscription marquée par une forte densité de "Bélorgey" . Ce patronymique bourguignon fréquent  a notamment fourni un officier d'artillerie, un supérieur de Cîteaux, un récoltant de Pommard, une bonne pléiade d'agriculteurs et de membres des professions commerciales et libérales, un photographe coquin célèbre dans les années cinquante pour lequel mes camarades de service militaire se plaisaient à me faire passer. Je n'ai de lien direct de famille avec aucun d'entre eux. Voilà, lorsque j'ai pu l'établir, ce qui a rassuré l'éleveur de Pommard. Son premier accueil soupçonneux, lorsque je cherchais à acquérir son vin de mon nom,  manifestait en effet certainement l'inquiétude que mon lignage me permette de revendiquer quelques ouvrées de son cru.  Ma seule ascendance est dans les paysans du canton de Nolay. Appartenant, loin des vignes, aux familles pauvres des rebords du Morvan - dont chacun sait sur la côte qu' "il ne vient que des bestiaux, mais ni bonnes gens, ni bonnes ieaux" - ils durent, à la fin du siècle dernier,  aller chercher pitance à Paris. Ainsi peuplée de lointains ancêtres et homonymes, ma Bourgogne a bien servi le Périgord. Philippe Lecat m'a reçu, avec les gens de mon nom, aux Hospices de Beaune, puis m'a bien aidé. Il m'avait  dit,  un jour, aux Eyzies, sous l'homme de Cro-Magnon, avec toute la malice de celui auquel on ne la fait pas :

 

« j'ai pris ta circonscription, je te devais bien ça ».

 

Parlait-il de cette rosette des arts et lettres qu'il me remettait publiquement avec tant d'humour ou du coup de main du Fonds d'Intervention Culturelle d'alors et sans lequel il n'y aurait pas eu de "Lascaux II"? Cette fructueuse copie  est, aujourd'hui, à la seule gloire de l'assemblée départementale, les élus occultant toujours ce qu'ont fait les préfets. Qu'importe. Le public revient en masse rentabiliser cette  prouesse de résine enfouie dans un blockhaus dont les boyaux font, au millimètre près, réplique aux courbes de niveaux des diverticules de l'original et portent les reproductions assurées avec des pigments naturels des peintures rupestres de la nuit des temps.

 

Cette nuit des temps est celle que déchire chaque aube révélant, dans l'ocre des lumières,  l'ondulation des longs compartiments de terrain par lesquels on pénètre dans "le pays de l'homme", comme ses panneaux publicitaires aiment à  désigner la Dordogne. L'interprétation du présent par les origines obsède quelques chantres du pays. Un personnage ayant tout un parcours classique d'enseignant, couvert de fonctions associatives, vif mercure de tant de cérémonies, n'aimait-il pas, soutenu par le rayonnement de son visage et de son accent, répéter sa lecture du "chabrot"? "Faire chabrot", c'est mêler du vin rouge à un fond de soupe ou de tourin d'ail écrasé, puis porter à ses lèvres l'assiette ou le bol du breuvage. Mais ne lève-t-on alors les yeux au ciel, ne redresse-t-on vers celui-ci ses deux petits doigts tandis que le corps de la main soutient le récipient ? N'est-ce la mimique d'une prière au soleil, symbolisant par les phalanges dressées les cornes d'un taureau dont le sacrifice teint de sang la nourriture de l'homme?

 

Les érudits locaux  débattaient du sens des peintures décorant les grottes et, plus encore, des milliers de dessins qui y sont aussi gravés et qui n'apparaissent souvent que sous l'éclairage rasant d'une torche. Il y avait les tenant des différents symbolismes : sexuel, magique, religieux , invoquant les pères des découvertes ou le pape Leroi-Gourhan. Il y avait celui qui soutenait que les grottes n'étaient que d' immenses tableaux de chasse, comme les livres d'or d'aujourd'hui : "les peintures c'est le frontispice; les gravures, en dessous et autour, c'est le décompte des animaux tués; c'est en même temps une comptabilité de répartition entre les hommes et les clans, comme le fait apparaître telle ou telle présence stylisée d'un personnage ". Il a accumulé les croquis et les notes. Il cherche toujours un éditeur, avec moins de succès qu'un collaborateur de la Nasa qui, dans "les racines de la civilisation" (Plon 1972), esquisse une théorie selon, laquelle les inscriptions rupestres sont commandées par des cycles lunaires, ont un sens cosmique et sont donc l'un des premiers pas vers la découverte de l'espace. Séduit par l'hypothèse du livre de chasse, je m'en ouvrais à un ecclésiastique, grand spécialiste du Périgord, le père Pommarède dont les travaux d'histoire locale font autorité. Il me répondit que j'étais comme l'homme de la Nasa. Ceux qui n'ont pas de foi choisissent toujours de lire un phénomène mystérieux par leur déformation professionnelle ou personnelle. C'est parce que j'étais sans doute athée, au mieux un agnostique, et surtout grand chasseur, que j'étais tenté de voir dans ces rites picturaux dont la dimension spirituelle était, pour lui,  évidente, des tableaux de chasse et une geste comptable. 

 

Mon plaisir était de faire vivre souvent en complices des gens qui, dans un paysage partisan durement bipolaire, se battaient sans merci au plan politique. On vérifiait la vieille formule selon laquelle une préfecture, pour remplir sa fonction de médiation,  c'est d'abord un drapeau et ensuite une cuisinière  Les élus se souciaient d'ailleurs de savoir si j'avais bien tous les moyens nécessaires aux réceptions. J'avais, à mon arrivée, allégé les déjeuners de manière qu'ils puissent effectivement être des "déjeuners de travail", mais ce n'était pas conforme à une tradition d'opulence. Une délégation inquiète vint s'enquérir auprès de ma femme si le budget alloué lui suffisait. Celui-ci permettait largement que la Préfecture soit la Maison commune aux tables de laquelle se découvraient parfois des hommes et des femmes que la vie locale séparait, des membres de professions bien différentes, des personnalités de passage appartenant aussi bien au monde des arts ou du show-biz du temps  qu'aimaient rencontrer médecins, hommes de loi, commerçants, syndicalistes, militaires, ecclésiastiques, agriculteurs, chefs d'entreprises, fonctionnaires, peintres, hommes de lettres, figures traditionnelles du pays ou résidents l'ayant adopté pour leurs vacances ou leur retraite.

 

L'un d'entr'eux - qui fut un éminent professeur à la Sorbonne et l'un de mes bons maîtres que j'estime très fort -  dîne à l'une des tables rondes qui accueille aussi à sa droite l'épouse d'un collègue,  fille d'un général. La conversation roule sur une période d'histoire contemporaine à laquelle a été mêlé le père de l'une et qui est de la spécialité de l'autre. Je suis satisfait d'avoir bien assorti mes hôtes dont les opinions sont contraires, mais qui partagent des sujets d'intérêt commun. La femme est brillante et piquante; l'historien âgé s'échauffe. Il prend la main de sa voisine, la porte sous la table et lui déclare, ravi :

 

« sentez madame, ce que vous êtes capable de faire à un vieil homme ».

 

L'héritière d'un soldat sut accueillir cet hommage en souriant et l'on passa au café. Je ne sus m'empêcher de raconter l'anecdote au chef de corps - le régiment de chasseurs -  face auquel  je m'étais retrouvé lors de ma prise d'armes d'arrivée. Par le plus grand des hasards, c'était l'officier avec lequel j'avais partagé mes derniers mois d'Algérie et qui avait été blessé dans l'opération pour laquelle j'avais donné le renseignement des gazelles avant d'être ré-embarqué pour la France. Nos différences de sensibilités n'affectaient pas une forte camaraderie. C'était un vrai Saint-Cyrien, un homme de guerre, le père très catholique d'une famille nombreuse et un bon compagnon. Il me conviait pour me distraire à quelques grandes manoeuvres. Il aima la verdeur de l'histoire . Il se la raconterait à lui-même lors de la prochaine prise d'armes.

 

«  Car, vois-tu - me dit-il - ces prises d'armes, il faut les faire pour montrer l'armée au pays, mais,  à la différence des manoeuvres,  c'est schiant. Tu le sais bien. Il y a de longs moments d'immobilité et de silence. A quoi peuvent bien penser tous ces gens qui sont là, pendant ce temps : nous, les trouffions, les porte-drapeaux, les anciens combattants ? »

 

Et il ajouta, parce qu'il avait des lettres, la vie militaire lui laissant le temps de lire :

 

« Je voudrais écrire un gros roman un peu pareil que " La vie, mode d'emploi " : tout ce qui se passe dans la tête de chacun pendant une prise d'armes : comment tous ces participants sont ailleurs ! »

 

Nous eûmes encore ensemble bien des onze novembre et des quatorze juillet, des inaugurations et des visites officielles. Mais il y avait plus délicat : les visites politiques.    

 

Dans la France républicaine, l'opposition est respectée . Peut-être plus encore lorsqu'elle est, au sein même d'une majorité, une fraction marquant sa différence par rapport au pouvoir en exercice.  Telle était la situation de Jacques Chirac faisant son tour des Français alors qu'il venait de céder la place à Raymond Barre. C'est ainsi qu'il vint à Périgueux où le grand baron qu'était Yves Guéna ne pouvait que l'accueillir au mieux. J'avais plusieurs  bons motifs de suggérer au bureau de l'assemblée départementale d'offrir un apéritif de courtoisie au visiteur. J'avais été son très proche collaborateur, mais, vis à vis de l'Élysée et du gouvernement certainement sourcilleux, il eut été périlleux  que je le reçoive personnellement. Mais c'était un  Premier ministre sortant envers lequel mon conseil général de gauche se plairait à un geste républicain. La solution était de faire de sa présence l'opportunité d'un contact , comme je le souhaitais toujours, entre des personnalités de familles politiques différentes. Le bureau de l'assemblée départementale fut séduit par l'idée d'un geste élégant. Il fut convenu que participeraient chez moi à une rencontre informelle autour d'un rafraîchissement, quelques grands représentants de tous les partis. 

 

Mes grands élus se retrouvèrent vers midi dans les salons préfectoraux  pour accueillir le visiteur déjà illustre et, dans ce sud-ouest, hors de toute option politique, sympathique à beaucoup de ses voisins de Corrèze. Je descendis pour l'accueillir devant le perron. Il arrivait à pied, accompagné de quelques amis et suivi d'un groupe nourri de sympathisants occupant sur plusieurs rangées toute la largeur des célèbres allées de Tourny. Il escalada les marches du seuil d'entrée, embrassa ma femme en lui disant :

 

« merci de nous accueillir ainsi ».

 

Il se retourna, hilare et chaleureux, vers les grilles où s'était massée la foule :

 

« bien entendu, vous entrez tous »,

 

ce que chacun fit avec empressement.

 

"Entrez tous", n'était-ce, en fait, mon propre mot d'ordre pour l'usage de la maison commune. Mais en l'espèce, le dosage n'était plus adéquat. Mes notables communistes, socialistes et radicaux se retrouvèrent dans un bain d'élus et de militants  gaullistes. Il n'y avait naturellement pas assez de verres, ni d'autres choses d'ailleurs. Le service débordé levait les yeux au ciel. Les membres du bureau s'éclipsèrent. Lors de la séance  suivante de l'assemblée départementale, celle-ci vota une motion protestant contre le fait que le préfet du département puisse utiliser les crédits de la collectivité pour une réception politique.

 

Puis les membres du bureau me convièrent à un large pot au bar du Conseil général. C'était d'ailleurs le lieu traditionnel des réconciliations parfois nécessaires entre le représentant de l'État et les membres d'une assemblée qui avait une conception bien à elle de ses pouvoirs. Lors des ouvertures de chaque session, loin de se limiter aux affaires d'intérêt départemental, ses ténors, et bien d'autres, faisaient un large tour d'horizon des problèmes internationaux et nationaux, engageaient des débats à leur propos et mettaient des textes aux voix. Le préfet qui assistait aux séances aurait du "poser la question préalable", c'est à dire s'opposer à ces points hors compétence de l'assemblée; mais il se contentait, sur la tribune, de reculer son fauteuil d'un air un peu distrait ou de compulser attentivement ses dossiers. Irrité par certaines difficultés avec mes  interlocuteurs locaux, ayant  traité un essai de sevrage tabagique  par quelque fortifiants abusifs, il m'est une fois arrivé de poser la fameuse "question préalable".Une part de la presse locale du lendemain me qualifia  de" préfet de combat". Il est vrai que j'avais appelé l'Assemblée à "ne pas confondre sa fonction administrative de conseil général de la Dordogne avec un rôle politique de Parlement du Périgord";  puis n'étant pas écouté, je m'étais solennellement  retiré vers mes bureaux suivi de la totalité des fonctionnaires.

 

La matinée écoulée, un émissaire des élus me pria, "puisqu'on n'était plus en séance officielle",  de venir partager les rafraîchissements de clôture. Dans cette région productrice de tabac ( prononcer "tabak"), il y avait aussi un plateau offrant  de larges dégustations de cigarettes et cigares qu'un conseiller de ces crus poussa vers moi.

 

« On sait bien pourquoi vous étiez si vif ce matin, Moussou le préfet. Vous avez arrêté de fumer; ça vous porte sur les nerfs; il ne faut pas. »

 

J'ai tendu ma main vers les paquets et j'ai recommencé.

 

"VOUS PARTEZ DÉJÀ" - 1978

 

.

 

 

En 1978, la chrétienté perdit un pape, Paul VI, ce qui conduisit à des offices très solennels célébrant sa marche vers l'éternité. Dans tous les chefs lieux de France, au premier rang des fidèles se comptaient les autorités civiles et les parlementaires et élus de tradition ou de la majorité d'alors. A peine quelques semaines plus tard, Jean Paul Ier qui avait succédé au pontife décédé disparut à son tour. Devant un tel acharnement du sort, un tel signe du ciel, le choc fut si réel dans la superstition de toutes les consciences que les nouveaux offices solennels rallièrent toutes les familles politiques au banc des cathédrales et des églises en deuil.

 

C'est ainsi que l'on vit, dans un département du Sud Ouest, les conseillers généraux communistes, avec des blouses bleues  de vacher et des foulards rouges, chanter en occitan les cantiques, tandis que même les plus laïques des socialistes vinrent s'unirent aux cérémonies. L'un des plus célèbres d'entre ceux de l'avant dernière génération et que ses amis avaient encore provisoirement laissé présider un conseil général en souvenir de ses services de ministre et de haut délégué, mais dont la santé avait été ébranlée par une attaque, se trouva ainsi, au premier rang. Il était face au choeur de la basilique, à la troisième place après le préfet en bel uniforme et le député maire du chef lieu, lui même ancien ministre gaulliste de haute rigueur et grande raideur dans les relations avec ses concurrents vis à vis desquels il avait un principe : ne jamais les saluer en public. Dans l'ordre du décret protocolaire de 1907, suivaient en rang d'oignons les notabilités diverses.

 

Lorsque l'officiant - au moins un évêque - se retourna vers les fidèles  pour leur dire "La paix du Seigneur soit avec vous. Donnez vous la paix" , chacun, répondant à une tradition conviviale bien vivante en cette partie de France,  se tourna vers son voisin pour lui donner la main, l'accolade, le baiser. Et  même le ministre gaulliste habituellement si distant, emporté par la charité chrétienne de ce grand jour, porta ses mains vers celles du  vieux président socialiste qui lui dit :

 

« vous partez déjà ».


 

 

 - "IL FAUT BIEN MADAME LA REINE"  / 1979.

 

 

Le déplacement au plus profond de la République d'une personnalité de sang royal est une affaire d'autant plus délicate que ce voyage est privé : même lorsque la voyageuse est l'une des plus sympathiques personnalité du temps, connue, sous les bombardements,  pour son courage solidaire avec son peuple et son soutien pour le nôtre pendant les épreuves de la guerre. Née avec le siècle, la reine-mère Elizabeth, l'a accompagné de sa force de vie, de ses toilettes pastel, de son teint vif surmonté de chapeaux en jardins et de cages d'oiseaux . Depuis qu'elle est libre de charges d'État, elle fait beaucoup de visites chez ses amis qui adorent sa tonicité et sa drôlerie. Ceux qui l'avaient conviée en Périgord appartenaient à ces familles de la noblesse anglo-française que, notamment dans le sud-ouest, rien ne sépare plus depuis la fin de la guerre de cent ans. Il est vrai  que sur la ligne des bastides qui faisait frontière, les seigneurs du temps étaient réputés avoir des plaques de cheminée avec un  blason royal sur chaque versant : l'un de France et l'autre d'Angleterre.

 

C'est ainsi que sur de vieux chemins balisés d'autant de vins appréciés en commun, d'échanges architecturaux  et d'alliances que de batailles et de sangs, la reine avait un programme d'accueil de châteaux en demeures. L'autorité d'État eut toutefois autre chose à faire qu'à saluer la reine  à l'arrivée et au départ sur l'aéroport de Limoges. Organiser un déjeuner de dames - pour lequel il fallu  informer la gentry locale que celles-ci devaient y participer avec chapeau- ne fut qu'un point d'orgue.

 

Les protocoles et services de sécurité avaient veillé à l'essentiel. Le dosage du cocktail martini dry  à servir fut communiqué par télégramme diplomatique. Le chauffeur, le page et la première dame d'honneur furent hébergés à la préfecture bien à l'avance, le premier pour prendre livraison de la Bentley, les deux autres pour faire le repérage de tous les lieux où coucherait la reine. Le groupe sanguin - exceptionnel, c'est un secret et je ne le dirai pas - fut indiqué de telle sorte que, discrètement, partout, sur les parcours, il y ait une voiture ambulance dotée des moyens et du liquide de transfusion adéquat. La grotte de Lascaux,  fermée à tous les publics pour que la préservation en soit assurée, fut évidemment ouverte à la reine plutôt que sa copie et Monsieur de la Rochefoucauld, son propriétaire fut consolé par cette visite, qu'il guida lui-même, d'avoir perdu des centaines de milliers de visiteurs par an.  Au cours du dîner qui suivit, on vit notamment rouler d'assiette royale en assiettes princières et républicaines, une énorme truffe que sa Majesté voulait absolument partager.

 

Tous ces soins et bien d'autres apportés, sans ironie,  avec respectueuse affection, à une telle visiteuse eurent pour délicat écho que ma femme et moi-même furent conviés à suivre presqu'en chaque étape le déplacement royal qui se déroula, sans un accroc, dans la bonhomie, la délicatesse et l'humour. Nous fumes invités à lui "faire signe" lorsque nous passerions à Londres et effectivement conviés, sans pouvoir nous y rendre, à son anniversaire suivant à Buckingam. Le plus grand étonnement de son voyage fut , alors qu'elle s'efforçait de mêler son anglais à une écoute attentive du français, de découvrir, dans ce pays réputé jacobin et unifié, l'emploi d'une troisième langue : la langue d'Oc. Pour l'honorer, les compagnons des Félibres - c'est à dire de ces sociétés d'hommes libres qui entretiennent les contes, les chants et les rencontres en occitan- lui donnèrent une fête, peuplée de danses et d'allocutions auxquelles la royale hôtesse souhaita répondre. Le député maire se débrouilla bien. Il traduisit l'esprit des Félibres dans un impeccable anglais qu'il parlait comme un Lord dont il a tout à fait le port; il traduisit l'anglais dans une langue encore différente de celle de Mérimée, celle de l'occitan du sud-ouest qu'il parlait comme un gitan dont beaucoup disent qu'il a le type. Après ces triomphes, la reine-mère ne voulut plus partir sans s'être un moment plongée dans la vie populaire du chef lieu.

 

Le marché , Dieu merci, avait lieu le matin précèdent son envol. Les sinueuses rues commerçantes voisines de la place principale, non loin de la cathédrale, étaient très animées et, de toute façon, impénétrables par la Bentley. Autour de celle-ci qui attendit sur un terre-plein, une volée de gamins demandaient au chauffeur, qui s'acquittait avec bonne grâce, de faire fonctionner et fonctionner encore le marchepied dépliant. C'est donc à pied, malgré les précautions envers l'artérite, chaussée d'escarpins bleus en harmonie avec le tailleur et la voilette, qu'avec son escorte, la reine "fit" la rue Limogeanne, un pèlerinage de Périgueux connu du monde entier. Elle entrait dans chaque cour admirer une architecture, un escalier, une voûte. Elle pénétrait chez les commerçants dont les vitrines offraient les produits les plus tentateurs - gras et vins moelleux - dont, malgré ses protestations, ils remettaient un échantillon à un membre de la suite. L'un d'entre eux réussit, avec la complicité de ma femme qui faisait souvent ses courses chez lui - " mais,  c'est ma petite cliente" - à lui faire signer son livre d'or. Puis, sous quelques bravos de bon ton et après avoir embrassé les petites filles qui lui offraient des fleurs, elle se porta vers les étals. 

 

Des grands parasols carrés ou octogonaux multicolores tendus au dessus les tréteaux donnent, sous la force du soleil, leur structure et leur intensité aux marchés forains de ce midi.  Venues des fermes et élevages d'alentour, les marchandes y exposaient, comme à l'accoutumée, des théories de canards et d'oies, plumés, alignés sur le dos, chacun l'orifice abdominal un peu ouvert pour que les acheteurs puissent estimer l'importance et la qualité des foies sans endommager la pièce. La reine mère d'un peuple aussi sensible aux animaux ne put se retenir. Dans un français attristé par l'accent, elle prononça : 

 

« oh !  les pauvres petites bêtes ».

 

Et la marchande, devant l'étal de laquelle elle s'était arrêtée, s'excusa :

 

« il faut bien, Madame la reine ».


 

 

 

 

 

 

 

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14 octobre 2012 7 14 /10 /octobre /2012 13:46

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Depuis Montignac, la Dordogne, Bordeaux et l'Aquitaine, LASCAUX II , puis  III (*)  voire ...IV non seulement s'offre aux visiteurs, mais désormais part pour ses tours du monde. La gestation de ce miracle  remonte à la fin des années  soixante dix et  mes souvenirs me portent, face aux annonces ambitieuses du présent, à rappeler quelques pas et quelques acteurs du passé.  

Ce chef d’œuvre de l’art préhistorique magdalénien est  dans une cavité de dimension moyenne composée d’une alternance de salles plus ou moins circulaires et de galeries-couloirs décorées de  fresques peintes et d'une profusion de gravures (bien visibles en lumière rasante ou sensibles aux doigts) représentant de nombreux animaux, accompagnées de signes énigmatiques constituant un ensemble qui laisse à penser que des échafaudages ont été utilisés.

Comme l'ont raconté bien des ouvrages et particulièrement ceux publiés par Pierre Fanlac, éditeur à Périgueux, ce sont  quatre  adolescents (Marcel Ravidat, Jacques Marsal, Simon Coencas et Georges Agniel) et leur chien, qui en septembre 1940 se risquant dans un trou ont, dévalant la pente d’un grand éboulis, découvert alors la Salle des Taureaux, puis le reste de la grotte en revenant  les jours suivants. Pressentant l’importance de leur trouvaille, ils informent  Léon Laval, alors instituteur à la retraite et passionné de préhistoire, qui se rend sur les lieux et fait de suite venir l’Abbé Breuil. Le « Pape de la Préhistoire » en séjournant plusieurs semaines, assure la notoriété  d'un site exceptionnellement  conservé à raison d'une couche de marne imperméable dans le calcaire, au-dessus de la cavité, empêchant les infiltrations d’eau et du cône d’éboulis de l’entrée qui maintenaient ensemble température et humidité constantes.

La grotte classée Monument Historique en décembre 1940 est incluse dans une propriété de Mr Emmanuel de La Rochefoucauld qui, après la dernière guerre mondiale, l'aménage sous contrôle administratif en vue de son exploitation touristique. De 1948 à 1963, un million de visiteurs se succèdent. Cette affluence rompt l’équilibre naturel de la cavité et on voit apparaître sur les parois des algues et des bactéries appelées "maladie verte", ainsi que de la calcite, "maladie blanche", qui est une recristallisation de la paroi rocheuse. Les recherches démontrent que ces dégradations ont  essentiellement pour origine la fréquentation intensive du site. André Malraux, Ministre de la Culture, fait alors fermer la grotte. Lascaux est sauvée et seuls des spécialistes ou des privilégiés de renom ( comme la reine Mère d'Angleterre à laquelle je la fis ouvrir en 1979) sont autorisés à y pénétrer. 

Pour conserver  à Montignac une attractivité touristique dans cette vallée qui est désormais connu comme "la vallée de l'Homme" ( où existe un chapelet de sites autour des Eyzies et où se développera ultérieurement un centre spécialisé sur la préhistoire) et pour accorder au propriétaire une  compensation de sa perte d'exploitation,  celui-ci reçoit une autorisation de reproduction d'un fac similé et le soin de son exploitation. Mr de la Rochefoucauld se lance alors dans un travail gigantesque d'excavation d'un site souterrain d'accueil pour y réaliser un fac simlilé partiel et dans de prodigieuses recherches des méthodes de reproduction des parois et des oeuvres qu'elles portent. 

Mais quand je suis arrivé en 1977, comme préfet de la Dordogne, ce grand chantier avait tourné court :  l'opération était en cessation de paiement et  des projets imminents de reprise par des investisseurs étrangers, pour en faire on ne savait trop quoi, appelaient une solution urgente.  Elle fut apporté par l'adhésion du  conseil général de la Dordogne, très attentif à son patrimoine naturel et historique,  à  ma proposition  de reprendre l'affaire et de devenir collectivité maître d'ouvrage de ce qui allait être "Lascaux II". Il fallut purger le dossier financier c'est-à-dire négocier avec au premier chef le Crédit Agricole  une restructuration des crédits, faire alléger le courageux  E. de La Rochefoucauld  des conséquences de son enthousiasme, obtenir de l'argent frais de la collectivité départementale et des concours d'État, ce qui répondait à la sensibilité du ministre de la Culture qu'était Jean Philippe Lecat et fut monté  grâce au fonds d'intervention culturelle ( le FIC que pilotait alors le membre très actif du Conseil d'État qu'était Michèle Puybasset).  

Rachetée par le Conseil Général en 1978, confié aux soins de l'0ffice départemental du tourisme,  "Lascaux II", dont la réalisation et la gestion sont animées par un fonctionnaire périgourdin passionné  Daniel Debaye, ouvre en juillet 1983  et propose environ 80%  de l'original. C’est une prouesse unissant une grande rigueur technologique (coque en ferro-ciment bâtie à l’image des constructions navales, reliefs restitués selon les courbes de niveaux très rapprochées  dans les moindres détails)  et de grandes capacités artistiques s'étant déployées des années durant   (dont celles de Monique Peytral http://www.psaila.net/multimedia/multimedia_638_fr.asp?id_select=638 et  celles de Gilles Lafleur , plasticien d'art pour une phase de restauration du fac similé qui fut-elle même rapidement nécessaire) qui a permis de recréer l’atmosphère  de la cavité originale : peintures polychromes exécutées comme il y a 17000 ans avec des colorants naturels, mais avec toutefois une perte au regard du pullulement des traits burinés dans l'original. 
Au moment où avec "Lascaux III", "la logique est d'aller beaucoup plus loin, au devant de ceux qui ne pourront pas venir en Dordogne, de ceux qui dans le monde souhaitent voir la richesse de cette grotte", comme l'explique à l'AFP Bernard Cazeau, président du département, moteur du projet, il nous a tout simplement paru bon de rappeler comment "Lascaux II" qui a été fréquenté par quelque 250.000 personnes par an depuis près de trente ans , avait pu voir le jour par la collaboration féconde entre d'une part une assemblée départementale très marquée à gauche et, alors, de vigoureuse opposition et, d'autre part, le pouvoir d'État de la  Veme République de l'époque.  
C'est une leçon de service public qui méritait ce petit rappel. 


 

(*) selon les articles de presse, "le clou de Lascaux 3 sont ses cinq fac-similés de fresques dans sa "Nef" aux parois reproduites grandeur nature, au millimètre près."

"C'est monumental. Avec des éclairages vibrants reproduisant les conditions des artistes de l'époque (lampe à huile, torche), on est face aux oeuvres, immergé...", explique son directeur Olivier Retout.

Plus piquant, l'expo présente aussi le seul "homme" de Lascaux: la silhouette rudimentaire d'un "Homme face à un bison fonçant", une scène narrative de chasse très distincte des taureaux et chevaux plus connus. Et qui, difficile d'accès au fond du "Puits" de la grotte, a été vue par peu d'humains.

Autour des fresques peintes sur des coques de résine recouvertes d'une "voile de pierre", l'exposition qui attend 200 à 400 visiteurs/heure offre aussi une large part interactive, des expériences sensorielles, une vue des fresques en évolution, de leurs détails, et toute l'iconographie de Lascaux, des photos noir et blanc de 1940 aux maquettes et images 3D d'aujourd'hui.

La sortie très médiatisée, et son prévisible succès populaire, interviennent à point nommé pour les défenseurs de la grotte et du projet "Lascaux 4": un "Centre international d'art pariétal" avec la grotte reproduite dans son intégralité, implantée à l'écart du site originel, que l'on veut préserver du flux des visiteurs de Lascaux 2, leurs voitures, leur pollution.

Il y a un mois, la ministre de la Culture Aurélie Filipetti annonçait le désengagement de l'Etat dans ce projet nécessitant 50 millions d'euros d'investissements. Une position sur laquelle la Dordogne et la Région Aquitaine, autres porteurs du projet, espèrent la faire "réfléchir".

Après Bordeaux jusqu'au 6 janvier, Lascaux 3, mastodonte remplissant dix containers, partira pour le Field Museum de Chicago, de mars à septembre 2013, puis Montréal d'avril à septembre 2014. Des discussions sont en cours avec San Francisco, Shangaï pour 2015, Singapour, Sydney.

"C'est le but du jeu: lui faire faire le tour du monde", explique Olivier Retout. "On va montrer une grotte hors de son site, dans des musées à l'autre bout du monde. Cela ne s'est jamais fait", assure-t-il.

 

      

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1 décembre 2008 1 01 /12 /décembre /2008 13:59
1 - Le défi de la crise et la réactivité - qu'il faut saluer - du Président de la république à l'égard des menaces de dépression/déflation semblent bouleverser tout à fait le rapport à l'Europe, voire au libre échange.
 L'importance des mesures de soutien , leur part de sélectivité selon les secteurs et la nationalité des entreprises, l'implication directe de l'État pour satisfaire des besoins de  fonds longs ou de crédits sur mesure consituent un paquet qui met en cause plusieurs principes qui étaient sacro saints dans la conception toute récente encore des disciplines européennes à respecter :
- bien sûr, un impact sur la faisabilité du pacte de stabilité
- mais, plus encore,  une atteinte inéluctable paraît-il - et, en tous cas,  souhaitable - à la règle selon laquelle, en interne comme en externe, les concurrences ne devaient pas être "faussées" : nous sommes, à nos yeux et sous réserve d'inventaire des mesures précises,  désormais hors du champ de la philosophie de la défunte constitution de l'U E, comme du traité de Lisbonne lui-même;
- au delà nous sommes entrés, sans qu'on le dise en aussi clair - car ce serait faire un affichage offert comme une cible aux libéraux ( et à ceux-mêmes de la majorité présidentielle d'origine)  dans l'acceptation d'une politique européenne de sauvegarde des activités de notre continent;
 - à ce pas capital, s'ajoute l'effet de ressac de la crise sur la poltique économique des émergents et au premier chef de la Chine qui s'apprêterait à soutenir, par les mesures sociales au moins , son marché intérieur au vu  du déclin  de ses marchés externes.


Ce que la pensée politico-économique unique n'a pu faire avancer,   commence à s'obtenir  par la force des faits. Les libéraux vont y voir le doigt du grand horloger qu'est le  régulateur : le "marché".


Nous n'en sommes pas encore aux analyses/préconisations de Todd  - dont il faut absolument consulter les présentations critiques mais éloquentes sur le blog "Horizons" , en particulier au regard des indigences de la réflexion de la majorité socialiste et de la presse bobo,  mais l'obligation politique semble incorporer peu à peu, sous l'effet de choc de la crise, les  diagnostics et recommandations du sociologue ( "protectionniste européen", intelligent, mais non xénophobe...)

Donc vraiment.. à suivre
!




2- Ne nous emballons pas trop vite  à propos de l'affaire de ce (ex) directeur de publication malmené par la police.

N'a-t-elle pas été obligée d'aller le chercher parce qu'il n'aurait pas répondu à convocation; point qui a été évoqué mais qui mérite d'être bien établi.

Si tel est le cas, c'est qu'à sa désinvolture de nobliau de la presse, pour les manants de police, a répondu démesurement une méchante leçon de la part de ceux qu'il traitait, avec une forme de mépris pour eux-mêmes et leur travail.


S'il y a bien eu convocations(s ?) méconnue(s?),  ce n'est vraiment pas la peine d'en faire une affaire d'État - parce qu'il est des médias ? - dans un sens ou dans un autre pour la pudeur de quelqu'un qui ne doit pas se déshabiller ( c'est la procédure regrettable, mais regulière) pour la prem!ère fois devant des tiers...encore qu'il fasse sans doute partie de ceux qui n'ont pas accompli le service militaire d'autrefois.

 



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5 novembre 2008 3 05 /11 /novembre /2008 20:19
J'inaugure ici une nouvelle rubrique : "Carnets" dont les feuilles seront chronologiques sans être nécessairement d'actualité, même si celle-ci peut inspirer de telles notes. Il s'agit en effet seulement de consigner quelques notations, sans développer ce qu'elles peuvent impliquer :  de simples points de repères de l'observation ou de la pensée. En vrac.

Voici donc "carnet 1" ( novembre 2008) que j'enrichirai ( j'espère)  de jour en jour.


1- méfions-nous, nous  qui avons tant lutté contre les racismes, sur les erreurs de jugement que peut entraîner l'antiracisme..
Ce n'est pas parce qu'un homme est noir ou métis qu'il est bon ou qu'il sera bon dans des fonctions qu'il a conquises contre le handicap ou grâce à la bonification tenant
à  sa couleur de peau ( une majorité d'Américains - mais hélas quand même  un peu moins de la majorité des blancs américains - ont voté pour B.O. , en mouvement de confiance à son égard, et aussi, bien évidemment,  pour que l'on cesse de considérer leur pays comme raciste). il faudra juger ensuite celui-ci aux actes et aux résultats sans tenir compte de l'image de race qui peut être un crédit  provisoire un peu magique.

2 -Il y a d'ailleurs, par la prédication,  de la magie dans le politique et spécialement dans le politique américain imprégné  de reliogiosité, et même de religions. Une campagne électorale américaine c'est ausi beau par le Verbe que les périodes des tribuns de nos Républiques. La lutte pour le pouvoir - lequel retournera à la gestion concrète et ingrate de l'économique, du social et du militaire -  se désincarne dans l'exaltation des mythes. Notre vieux pays, malgre des élans de N.S. et de S. R. n'a plus guère cela. 


3 - Les grandes bêtes politiques se respirent entre elles, fut-ce à travers les clans. Comme se flairent et se reconnaisent les loups. Constat que m'nspirent les félicitations émanant des uns et des autres pour le nouvel élu... et leur ordre d'apparition.

4 - Les salariés qui ne voudraient pas travailler le dimanche ne seront pas sanctionnés. Mais les candidats à un emploi  qui ne l'accepteraient pas seront-ils embauchés? . Le volontariat cache la carte forcée.
Par ailleurs augmenter l'offre commerciale par l'ouverture le dimanche  n'augmente pas la capacité d'achat des consommateurs !
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