Il faut résister aux situations (la politique conçue comme une communication, le conformisme de la pratique économique, la lecture restrictive de nos institutions) dans lesquelles sont enfermés des débats français récurrents, mais tout d'un coup enflammés par nos dernières péripéties.
Celles-ci resteront des non évènements - en ce sens qu'elles ne contribueront pas à changer grande chose dans la poursuite d’un quinquennat dont la conduite tourne le dos aux motifs de succès de son titulaire - si les "fondamentaux" qui nous gouvernent ne changent pas :
- le fondamental d'une pratique politique faite de messages symboliques dont les effets sont de remplacer les repères politiques des électeurs;
- le fondamental des axiomes européens en vigueur ( le libre échange et la priorité aux réductions de dettes et déficits) faisant que des changements politiques ne peuvent ouvrir l'alternative d'une autre stratégie économique, de telle sorte qu'on ne peut sortir de la ligne à laquelle on est tenu [i];
- le fondamental d'une cinquième république qui est regardée comme ne pouvant être que présidentialiste, alors que c'est un régime parlementaire dont prendre en compte les logiques et les virtualités.
1 - Le débat politique est de plus en plus caricaturé par un jeu de provocations et par les postures idéologiques des gouvernants dont les impopularités respectives déboussolent les électorats qui vont en devenir de plus en plus infidèles et transgressifs.
La rafale des récentes provocations a commencé, bien avant le discours au Medef, par la manière dont, dès sa désignation, un nouveau Premier Ministre (choisi à contre-courant des signaux très forts envoyés par deux consultations électorales) enjoignit avec autorité à "sa" majorité de jeter aux orties les anciennes convictions et les engagements qu'elle avait pris pour être élue, et de briser les tabous de la gauche traditionnelle, ce dont il se chargea bientôt lui-même par l'annonce claironnante de points de son propre programme présentés avec une désinvolte brutalité [ii], en ne voulant bouger d'un pouce d'une ligne stratégique se résumant à suivre les instructions européennes, appuyé qu'il est par les jugements péremptoires que porte une chancelière voisine sur ce qu'il y a à faire en France.
En réaction, une seconde éclatante provocation fut celle d'A. Montebourg : soit qu'oubliant la règle d'ingratitude, il se croyait intouchable par un Président qu'il a fait roi, soit qu'une impulsion de colère lui ait fait abandonner toute retenue d'expression et, la fièvre des meetings aidant, l'ait porté à accélérer l'expression de sa volonté de rupture. Ayant ainsi sous-estimé la pugnacité du coadjuteur du chef de l'État et le poids que celui-ci a pris, il a engendré cette immédiate et inévitable réplique de la démission du gouvernement et de la nomination d'une nouvelle équipe ministérielle; celle-ci se trouve d'un côté épurée et, d'un autre, elle comporte, en exprimant bien la malignité du duo exécutif, un condensé de provocations envers tout le monde venant s'ajouter à toutes celles infligées aux Français au cours de la première partie du quinquennat.
F. Hollande a été, malgré toutes les mises en garde ( dont on trouve de modestes mais sérieuses traces sur ce site qui souhaitait son succès) l'artisan impavide de la construction de sa propre impopularité : auprès de dirigeants et de salariés d'entreprises, en mettant en exergue de bien inutiles chiffons rouges comme les 75% d'imposition, la suppression des avantages aux heures supplémentaires, puis auprès de milieux de gauche en faisant machine arrière sur cette mesure symbolique de la taxation des plus values en cas de process très juteux d'acquisition/fusion/cession d'entreprises (ce qui, sous le terme de "private equity" est un des cœurs de métier du capitalisme financier au bénéfice, dans les meilleurs des cas, de sociétés ayant besoin de capital risque - comme ces start up mises en avant par les "pigeons" - , pour le plus grand profit, dans les pires des cas, de requins se plaisant à des opérations d'acquisition, succion des éléments d'actifs sur le dos des anciens actionnaires, douloureuses restructurations sur le dos des salariés et rapide revente spéculative).
Ensuite , tout en réussissant de bonnes réformes (dont son étape sur les retraites), mais croyant devoir satisfaire, à l'arraché, des promesses qui n'intéressaient qu'une fraction marginale de son électorat, le Président a choqué par son refus entêté d'une consultation référendaire sur le mariage gay, évidemment toutes les droites, mais aussi une partie de la gauche populaire elle-même qui est attachée à des valeurs traditionnelles, ces courants bien différents redoutant ensemble que s'ouvrent un basculement des mœurs par la promotion d'un paradigme niant les différenciations sexuelles.
Puis, le Président, dans la ligne de ses premiers renoncements à une autre fiscalité, a ensuite provoqué et déçu de plus en plus sa base électorale en prenant pour argent comptant (et emploi promis) que la généralisation à la France des recettes du néo-libéralisme ( la rigueur budgétaire, les chances qu'apporterait d'aller dans le sens des moins disant fiscaux ou sociaux, l'idée que l'attractivité de notre territoire ne peut résulter que des meilleurs taux de marge pour des actionnaires ) était la voie de salut de la France.
Passant pour incapable de décisions ( cf. les grenouilles qui demandent un roi, publié sur ce site le 08/01/2014 publié ) , il a viré (comme le poussait à le faire une presse dévouée au lobbying demandant des "ruptures" et "des réformes structurelles") à un autoritarisme satisfait.
Un point d'orgue est le nouveau casting gouvernemental (que présenta Jouyet, un peu comme un fantôme de l'ouverture de Sarkozy) et qui a inspiré ce tweet à Dupont Aignan : "La Banque à l'économie, le Genre à l'Education nationale et le laxisme à la Justice", encore que ce soit plus subtil : Macron est certes une provocation pour la gauche et Belkacem une provocation pour la droite [iii]. Lorsqu'on constate que leurs deux nominations ont peu à voir avec leurs compétences - puisque le premier n'a aucune expérience du pouvoir pour mériter d'emblée un tel poste et que la seconde n'ayant d'autre formation que sc. po et l'assistanat parlementaire, puis l'expérience d'avoir été une délicieuse pédagogique langue de bois tout à la fois du monde hollandais et des sportifs, ne justifie d'aucun autre titre que la faveur du roi pour cornaquer le "mammouth" - il est évident que leur fonction est de jouer le rôle de signaux de positionnement de l'exécutif et de définition de la ligne de la "nouvelle, nouvelle gauche". C'est très clair, et c'est à fronts renversés par rapport à la tradition.
Alors qu'autrefois - était-on même simplement social-démocrate - on considérait que le front majeur du combat était le front économique et social, avec souvent le front laïque, et que les autres domaines (pour les femmes, les homo et transsexuels, la culture d'avant-garde, les minorités opprimées, les victimes de racismes, les drogués, les prisonniers, les exclus, etc.) étaient des fronts secondaires, aujourd'hui et désormais le programme de la gauche est entendu comme devant être de chercher, certes, à tirer le meilleur parti possible d'une mise en œuvre conformiste de l'"économie sociale de marché", mais essentiellement de conduire une politique sociétale des droits de l'homme et de la femme, voire une prise en compte des désirs et des souhaits d'idéologues marginaux, mais influents dans tous les champs publics, l'ensemble étant sous le signe du libéralisme : comme le montre la marche d'un monde auquel il faut se plier, les libérations de l'économie et des mœurs doivent aller de pair : voilà qui réunit heureusement l'esprit de lutter contre toutes les fractures et celui de satisfaire aux intérêts commerciaux prodigieux que ces libérations nourrissent. A la charnière de l'économique et du sociétal, il ya naturellement la question de l'immigration, mais pour l'instant (sauf pour le droit d'asile en voie de réforme disputée) cette question - une pierre d'achoppement pour la nouvelle nouvelle gauche - est trop difficile pour qu'elle soit sous les projecteurs.
Le bon commentaire du casting ministériel est celui (dans le Figaro du 26/8) de André Bercoff : il témoigne d'un "choix libéral-libertaire". Nous ajoutons que l'inspiration est donc 1968 plus que 1848 ou que le programme du CNR (que sont seuls à demander ces rétrogrades du Mouvement d'Éducation Populaire)! C'est la modernité; ce serait "le socialisme du réel", non loin de Terra Nova et de l'inspiration de Michel Rocard qui doit quand même en trembler un peu ?
On voit bien, sous cet éclairage, pourquoi Taubira - qui, à notre sens, n'est pas laxiste, mais bien pragmatique, car elle doit faire avec l'insuffisance, pour des motifs d'austérité budgétaire, de places correctes de prison - est toujours là . Avec Belkacem, ovationnée par l'université d'été du PS, ces femmes sont des flambeaux qui témoigneraient que, nonobstant son conformisme économique, la gauche reste la gauche, ce qui aide à oublier qu'en matière sociale elle ne l'est plus guère. La présence du sociétal doit faire passer l'absence du social.
Par ces postures, l'affectif remplace le rationnel qui ne disparaît pas partout et qu'incarne la bonne élève Pellerin : une politique des mœurs doit suivre l'évolution des relations de celle-ci avec les techniques du temps, ce qui contribue à définir les nouveaux espaces et enjeux culturels : d'où pour remplacer la classique Filipetti, la moderne Fleur Pellerin dont l'absence de profil culturel est aussi une (petite) provocation ; mais on dit qu'elle goûterait les spectacles vigoureusement appréciés par des nouvelles générations, ce qui fait qu'on en espère un effet Lang féminisé; et l'on sait que sa compétence "numérique" la met en bonne situation pour chercher à concilier la nécessaire protection des droits culturels avec l'incontournable offensive (productrice de grands succès commerciaux) des réseaux immatériels, des transcriptions numérisées et des services à domicile. Là encore, la cuisine qui intéresse la nouvelle nouvelle gauche n'est sans doute pas de produire un menu économique original français (sauf, dans la ligne traditionnelle, pour la production cinématographique, puisqu'il vaut mieux pour bénéficier d'une "exception" française, être scénariste que sidérurgiste) , mais d'être à la table du menu socioculturel mondial. À la charnière des deux, il y a quand même quelques problèmes sociaux.. comme les libraires et les intermittents et quelques défis économiques... comme ce que voudrait instituer, en matière de libre échange de services, le projet de traité Atlantique nord.
Après avoir encore noté que ni Macron, ni Pellerin ne détiennent de mandat électif et que ceux de Belkacem sont territoriaux, on appréciera que le pouvoir pondère par des éléments issus de la société civile (technique ou emblématique) une composition d'équipe dont la base proprement politique s'est considérablement effritée, ce qui est une autre affaire (que j'évoquerai in fine: une majorité socialisait est-elle encore vraisemblable ?).
Pour en revenir au nouveau ministre de l'économie, rien ne permet de le juger, sinon par les écrits et premières interventions qu'on en connaît montrant que c'est, malgré le symbole qu'il représente, un homme fin, modéré et bien élevé qui n'a pas pris son prédécesseur à rebrousse poil, mais dans un certain esprit de continuité. On devrait peut-être lui reprocher que, selon ce qui s'est dit, il aurait bien poussé à la reculade gouvernementale sur les “pigeons" , mais on ne saurait lui reprocher d'être "un banquier d'affaires" : ce serait une compétence appréciable pour mieux contrôler les milieux considérés qui doivent désormais - sous la vigilance de tant d'Autorités de supervision et par l'obligation de subir bien des tests de résistance bancaire - se soumettre à tous les ratios de Bâle 1, 2,3,4, etc.; encore que la spéculation (surtout instantanée que conduisent golden boys and girls dans les salles de marché) ne relève pas du même métier , mais de celui de trader qui exige beaucoup de flair, de prise de risques et surtout de technicités. Pour le reste, la banque d'affaire n'étant plus seulement de "savoir déjeuner" (obligatoirement en anglais), mais aussi de savoir bien utiliser les audits des spécialistes d'analyse financière - opérant dans un esprit qui est largement aujourd'hui celui des membres des corps d'inspection et de contrôle appartenant de fait au même monde - semble bien former le jugement de ses membres au plus grand simplisme : ce qui est bon comme politique économique c'est ce qui assure le meilleur "total return" ( revenus+plus values) du capital investi. Toute une ligne de conduite qui fait écho au style simplificateur et résolu du titulaire de Matignon. Surtout lorsque les patronats très écoutés en veulent toujours plus pour leurs actionnaires, comme pour le maintien des bonnes situations (rémunérations+avantages) des cadres gérants et/ou dirigeants, si bien que baisser le coût du travail se focalise sur celui des exécutants subalternes.
Ayant passé pour ma part moitié de ma vie profesionnelle dans le service public et l'autre moitié dans le service des entreprises, je respecte profondément leur fonction de produire et d'employer et je mesure tout à fait leurs besoins d'allègements de toute nature que je n'ai cessé de demander ou de préconiser, mais pour autant, je ne donnerais pas, par une ode à l'amour des entreprises ( qui sont si diverses..), dans un lyrisme déplacé par son absolutisme, ses oublis des partenaires sociaux et, donc, ses déséquilibres...
Après un tel discours, ce qui est à redouter c'est de voir le pouvoir emboîter des thèmes proches de ceux déjà développés sous le précédent quinquennat : il faut largement revoir tout le droit du travail; il faut réduire la couverture chômage pour obliger les demandeurs d'emploi (à contrôler beaucoup plus strictement, cf. ce que fait Rebsamen) reprendre n'importe que job; il faut une "révolution culturelle" (Gattaz dixit) sans doute inspirée par le modèle entrepreneurial puisque les entreprises sont les seuls acteurs à créer de la valeur ( ce qui - compte tenu au moins du rôle de la dépense publique pour les carnets de commande, pour la recherche et du rôle des formations délivrées par l'appareil public et entrant dans les valeurs ajoutées - est pour le moins inexact et mal vu); il faut remettre vraiment en question la fonction publique à la française, l'espace administratif, etc.; en bref il faut passer d'un pouvoir public à un pouvoir privé, de la même manière que le projet de Traité économique pour l'Atlantique Nord a imaginé de soumettre des décisions des pouvoirs publics (portant atteinte aux intérêts des transnationales) à des jugements de tribunaux privés d'arbitrage ...
Contre toutes ces dérives, il faut faire appel à tous les niveaux de la vie publique et sociale à l'esprit de résistance et de bon sens.
Déjà, le cinéma du casting gouvernemental (et ce qui peut aller avec...) peut porter bien des effets pervers.
Avec les emblèmes et le ton qu'il a choisi, Valls fait deux cadeaux à la droite : bien sûr, d'abord, appliquer une politique économique qu'elle souhaite et qu'elle viendrait peut-être même bien soutenir si elle n'était pas gênée en ne sachant pas pour l'instant, si , compte tenu de son leader encore non déterminé pour la Présidentielle, il lui faudra jouer le clivage antisocialiste de principe ou étouffer les sortants de reconnaissance pour ce qu'ils auraient enfin compris des exigences de l'économie et les désigner ainsi à la vindicte de leur ancien propre électorat de gauche.
Il en sera à peine besoin car le second cadeau ( irréversible , sauf si d'un coup le chômage ne progressait plus) de Valls à la droite c'est de faire purement et simplement perdre à la gauche une fraction non négligeable de son électorat : de celui qui est composé de ces catégories professionnelles avant tout attentives aux conséquences concrètes de leurs votes et de cette petite bourgeoisie certes "progressiste", mais non "libertaire" dont nombre de gens peuvent tenir le raisonnement suivant
- je n'ai plus de raison de voter pour la gauche de gouvernement puisque en matière économique et sociale, elle ne parvient pas à faire une politique alternative à la droite (et que c'est plus clair et honnête que chacune joue son rôle);
- et je n'ai même plus de raisons de voter pour elle afin de transformer autrement la société, puisque cette nouvelle, nouvelle gauche semble vouloir m'embarquer par principe vers des évolutions dont je ressens plus les risques d'excès que le besoin, et d'ailleurs certaines tendances à droite et au centre ont accordé aussi, mais avec plus de prudence, une attention réelle à ces questions de société qu'il s'agisse des droits des couples de même sexe, des familles recomposées, de la question des fins de vie, etc.
C'est ainsi que sous les pieds de cette nouvelle nouvelle gauche, pourrait bien être tiré le tapis sur lequel elle croît pouvoir surfer. Voir s'en détourner plus encore qu'aujourd'hui (alors que déjà bien des électeurs socialistes ont manifestement viré pour le FN ou pour l'absentions), c'est l'espoir qui inspire la diatribe d'un homme comme Roland Hureaux dont je suis loin de partager toutes les convictions mais qui, par le style et par l'appel au "peuple" mérite d'être largement cité[iv] : ce texte explique bien certains des effets possibles du casting gouvernemental. Ceux-ci ne peuvent être qu'amplifiés si des "libertaires" aux commandes s'engagent dans des tentatives de forcing pour faire prendre en compte et mettre en œuvre (fut-ce, à l'éducation nationale, avec les meilleures intentions du monde, mais avec des outils pédagogiques contestés) des idéologies que sont loin d'accepter bien de nos concitoyens et si des "libéraux" à l'économie et au travail ouvrent des chantiers remettant en cause les acquis sociaux....
_____________________________________________________________________________________
C'est fini pour aujourd’hui. Vous aurez demain la seconde partie de mon analyse : sur l'impossibilité de débats économiques sérieux au sein d'un pouvoir complètement imprégné de la doxa européenne. Une troisième partie, enfin, mettra en exergue, à la lumière des enseignements très mitigés ressortant de la Rochelle, que les élus étant totalement tétanisés par le chantage à la dissolution, la Vème république semble bloquée sur le rail actuel, alors que Valls n'est pas "la dernière cartouche", et qu'il pourrait exister d'autres issues.
[i] J’ai toujours indiqué sur ce site que la victoire socialiste ne pourrait rien changer à la ligne précédente (contre laquelle Hollande a été élu.. par défaut) si les "fondamentaux" inscrits dans les Traités (libre échange, concurrence non faussée, objectifs prioritaires de la stabilité monétaire, et de réduction drastique des endettements et déficits) n'étaient mis en cause. A défaut, c'est le règne obligatoire de TINA.
[ii] Comme la suppression des départements que louait quelques semaines auparavant le Président de la République et dont certains (les "ruraux") vont avoir un sursis parce le chef du gouvernement a besoin des radicaux (qui tenaient beaucoup à la survie de cette collectivité) viennent de mettre cette condition à leur soutien.
[iii] et bien au delà pour la France traditionnelle qui n'en retient pas seulement l'ABCD de l'égalité dont certains outils peuvent effectivement choquer, mais au delà sa passion très personnelle apportée à un combat ultra féministe (dont le modèle extrême est l'américaine Judith Butler: en voir par exemple les thèmes in "HÉMISPHÈRE GAUCHE" de R. Keucheyant , Ed. ZONE, 2010, page 237/242) avec une tendance à la défiance et à la répression envers des publics masculins et avec un soutien à toutes les mœurs pouvant disloquer (et remplacer?) ce qui est réputé être et ce qui est ressenti comme les altérités sexuelles : si derrière d'excellentes intentions (comme, par exemple, éduquer au respect des filles), pointe une remise en cause doctrinale des bases anthropologiques de la société existante, cet ébranlement majeur sera malheureusement reçu avec beaucoup d'hostilité et de malaise par bien des "honnêtes gens" de tous les partis et de toutes les générations.
[iv] UNE TRIPLE PROVOCATION (blog de R. Hureaux, extraits)
"Le nouveau gouvernement Valls est loin de n'être qu'un replâtrage destiné à se débarrasser de quelques forts-en-gueule. Malgré le maintien d'un certain nombre de poids lourds (...) à des ministères clef, l'annonce du nouveau gouvernement n'est pas neutre: elle représente une triple provocation.
Vis à vis de la gauche historique d’abord, par la nomination d'un jeune banquier réputé ultralibéral à l'économie..... En même temps, cette nomination se veut un signal fort adressé aux marchés financiers et aux instances de Bruxelles.....
La deuxième provocation est cette fois, vis à vis de la droite, en tous les cas du peuple de droite - sans exclure certains éléments venus de la gauche, qui était massivement descendue dans la rue en 2013 pour s'opposer au mariage dit "pour tous" tous. Le combat s'est poursuivi sur la question de la fallacieuse théorie du genre à l'école. Mise en veilleuse par Benoît Hamon, l'affaire ne pourra qu'être relancée par Najat Valaud-Belkacem qui s'est avérée dans les précédents gouvernements comme une des plus ardentes propagandistes de la subversion des valeurs du mariage et de la famille au point que non seulement Hervé Mariton a pu la qualifier de "Vietminh souriante" mais que même un Julien Dray la situe "sur la ligne des féministes ultras américaines, qui sont en train d'émasculer les sexes". Sa nomination porte un message clair : l'éduction nationale, ce n'est plus l'instruction publique, pourtant si nécessaire, ce sera la rééducation des enfants à toutes les lubies de la gauche libertaire....(À) un moment qui devrait être celui de l'apaisement, sa nomination est ressentie comme une provocation à l'égard de la Manif' pour tous et de ses héritiers. On retrouve là la marque du vrai Valls, non point le prétendu social-démocrate modéré, mais le policier sectaire qui ordonna les poursuites les plus disproportionnées contre les manifestants pacifiques hostiles à la loi Taubira.
On sait à quel point la frange musulmane de la population acquise à la gauche à 90 % en 2012, s'en est détachée au point de s'abstenir massivement aux municipales , entre autres à cause de la théorie du genre, aucun parent musulman ne souhaitant que l'école publique porte atteinte à la virilité de son garçon ( comme à la féminité de sa fille ! ). Il n'est pas sûr que ses origines sauvent à cet égard Najat Vallaud-Belkacem d'une confrontation, au contraire. Farida Belghoul contre Najat Vallaud-Belkacem, l'empoignade à la sortie des écoles promet d'être rude !
La troisième provocation est le maintien de Christiane Taubira à la justice (je coupe le passage qui suit : il me semble infondé à l'égard de garde des Sceaux et il n'apporte rien qui ne soit connu au débat).
..............................................
Premier message donc : la gauche restera de gauche, avec tout ce que cela a de plus provocant, dès lors qu'il ne s'agira pas de toucher aux grands intérêts.
Deuxième message: c'est sur le plan sociétal que la nouvelle gauche libérale libertaire trouvera sa légitimité. C'était déjà la ligne de François Hollande, inspirée par la Fondation Terra Nova, mais désormais cette ligne se durcit. Le maintien de Taubira, la promotion de Belkacem sont destinés à équilibrer la droitisation économique et sociale.....
Mais ces trois provocations, bien dans le style pète-sec de Valls, c'est précisément là ce qui fragilise le nouveau gouvernement. Elles ont en effet en commun de viser le peuple : peuple de droite, peuple de gauche, qu'importe ? C'est le peuple dans son ensemble qui ne veut pas que la France soit livrée pieds et poings liés aux seules logiques financières, c'est le peuple dans son ensemble ( pas seulement celui des sorties de messe, mais aussi celui des banlieues ) qui refuse la théorie du genre . C'est le peuple dans son ensemble qui veut la justice et la sécurité ......Relance de l'action gouvernementale ? Peut-être, mais sur la même ligne durcie : libérale sur le plan économique, libertaire sur le plan des mœurs. Mais aucun gouvernement ne saurait agir efficacement en prenant ouvertement de front, comme le font Hollande et Valls, les aspirations les plus légitimes des Français. Gageons dès lors que ses jours sont comptés."